Charlotte Linden Ercoli Coe – Charles sur scène et pour les intimes – enregistre seule sa musique dans sa chambre ou son garage de Los Angeles. Dans le sillon de la musique lo-fi et le concept du DIY, l’œuvre de Charles s’inspire de la sensation du manque et de la solitude, qu’elle retranscrit par écrit – seule et enfermée dans sa voiture. Les synthés en boucle se posent sur des paroles très intimes qui nous replongent dans nos premiers amours déçus (avec, Cactus Milk) ou nous apprennent à tirer le meilleur de nos bourdes les plus inavouables (That’s How Baby Learns). On aurait tort pourtant, de croire que tout est gris et triste en Charles. Flamboyante de rousseur et d’énergie la jeune musicienne est un rayon de soleil – lorsqu’on la rencontre à Los Angeles ses mots sont mesurés, ses phrases précises et son calme contagieux – à l’image des grandes personnes sages. Sauf qu’elle porte un sweat-shirt oversized, qu'elle sait faire la grimace et qu’aux dernières nouvelles, Napoleon Dynamite est le film qui a changé sa vie.
Quand est-ce que tu es devenue Charles ?
Au risque de sonner très très cliché… J’ai toujours été Charles ! On m’a toujours appelé comme ça – c’est un prénom, plus qu’un alter ego. J’ai Charlotte écrit sur mon passeport mais sinon, j’ai toujours été Charles aux yeux des autres.
Tu écris et enregistres tes chansons dans ta voiture. Pourquoi ?
Je suis très impatiente dès qu’il s’agit de travail – non pas parce que je galère à rester authentique mais surtout parce que je brasse de l’air. Lorsque je commence à écrire sur un morceau, il me faut un ou deux jours pour chaque strate, et quelques heures pour y poser ma voix. Je les écris sur le vif, toujours. C’est en ça que ma musique est sincère, intime. J’enregistre dans ma voiture parce que je suis très timide et que j’ai besoin d’être seule. Je vis avec ma sœur et je ne peux pas lui imposer de m’écouter répéter mille fois le même refrain, c’est l’enfer pour les autres ! Donc je me cale dans le garage, souvent en pleine nuit, je m’assois et je commence à chanter.
Est-ce que le fait de faire de la musique dans un environnement isolé développe certains de tes sens ?
Complètement. J’ai l’impression qu’en étant seule, je suis moins consciente de ce que je suis en train de faire. Mais paradoxalement, c’est dans ces moments où je me laisse complètement aller que je parviens à puiser le plus d’inspiration. La plupart de mes chansons parlent de mon quotidien, de mon entourage et les interactions que je noue avec eux m’inspirent en retour. En revanche, j’ai besoin d’être livrée à moi-même pour écrire.
J’imagine que tu ne penses pas à faire des collaborations pour le moment, du coup ?
Il m’est arrivé de prêter main forte à quelques personnes à composer leur musique mais quand il s’agit de la mienne, je refuse catégoriquement que quelqu’un mette un pied dans la pièce. Quand j’avais 16 ans, j’ai sombré dans une dépression terrible après avoir copié à un DST de SVT en cours. Oui, je suis un peu une psychopathe. Je n’étais plus vraiment sûre de tenir à la vie après cet événement. Parce que je m’étais dit qu’après avoir copié sur un autre, jamais plus je n’aurais été capable de faire des trucs à moi. Je m’imaginais le pire, la descente aux enfers juste pour avoir eu la mauvaise idée de recopier UNE fois quelqu’un. Aujourd’hui j’en rigole mais rien n’a vraiment changé : je fais tout par moi-même, je dois tout faire de mes mains. Je réalise et je monte moi-même mes clips et j’insiste toujours pour tout faire seule. Je sais que ce n’est pas très sain. Je commence tout juste à me laisser aller. Mais non, pas de collaboration prévue pour l’instant.
Tu es donc sur tous les fronts : la musique, la réalisation, le montage…
Pour moi c’est un peu la même chose. La seule raison pour laquelle j’ai un jour rêvé de faire de la musique, c’était de savoir qu’un jour, je réaliserai mes clips et ma pochette d’album. J’y pensais tout le temps. Je m’inventais des faux noms d’albums, de fausses pochettes, tout était déjà dans ma tête.
La ville de Los Angeles t’inspire ?
Énormément ! Je rencontre tellement de drôles de spécimens ici. Les freaks qui se pavanent sur Hollywood Boulevard m’inspirent de très belles choses.