La réalisatrice, scénariste, actrice et auteure Desiree Akhavan a quitté son Brooklyn natal et ses cheveux indigo pour rejoindre Londres. « À New York, chaque endroit et chaque rue que tu parcours te remémore un souvenir », confie-t-elle. Beaucoup la connaissent pour son long-métrage, Appropriate Behaviour, qu’elle a écrit et réalisé et dont elle tient le premier rôle. Ce film est inspiré de faits réels et tiré de son propre vécu. Il évoque des problématiques comme la sexualité, l’amour et les montagnes russes émotionnelles que nous ne cessons jamais de gravir au quotidien. C’est en quelque sorte un récit autobiographique même si la réalisatrice insiste sur le fait que son personnage, Shirin, est une version imagée et décalée d’elle-même. Elle nous a confié ses doutes, ses espoirs et ses conseils pour grandir et s'aimer.
Qu’est-ce qui te différencie de ton personnage, Shirin ?
En réalité, je ne me vois pas trop en Shirin et je pense que mes amis proches seraient assez d’accord pour dire que nous sommes en tout point différentes. Malgré tout, j’ai pensé et conçu ce film, les émotions de mon personnage sont aussi un peu les miennes. Je voulais que mon personnage soit dur. Je n’ai jamais voulu dresser un portrait héroïque de moi-même à travers elle. D’ailleurs, elle fait pas mal de trucs pas cool. Moi aussi, mais de façon différente. Ses angoisses et ses rêves, le scenario catastrophe et les pires revirements de situation sont, en revanche, de moi. Ils me correspondent assez bien (rires) !
Sur quoi travailles-tu, en ce moment ?
Beaucoup de super projets. Je suis en train de réaliser deux films et je suis également sur un projet de série sur les dates, qui se tournera dans le East London. Je suis par ailleurs en train d’écrire pour un autre truc. Après deux années de chômage à galérer et écrire des films sans savoir de quoi le lendemain serait fait, tout m’est tombé dessus, précipitamment ! On entend rarement les artistes très talentueux et reconnus dans leur milieu parler de leurs premières années à batailler. Évidemment, la face glamour est plus rentable en matière d’histoire à raconter. Lorsque mon film, Appropriate Behaviour, s’est retrouvé à Sundance, j’ai signé chez une très grande agence – c’était une année marquée par de nombreux voyages, que j’avais faits en suivant les différents festivals pour présenter ce film. Ma vie avait pris un tournant très doux, heureux, grisant. Mais de l’autre côté, j’étais submergée. En ce moment, j’écris un roman et j’ai très envie de raconter ma vie post-Sundance parce que mon ambition première, c’était ça : « Entre à Sundance avec ton film, tu auras accompli ta vie ». Mais en réalité, non, avoir un film à Sundance n’est pas synonyme de réussite professionnelle. Il faut forcer le destin, l’échange, la chance, les opportunités pour s'émanciper et se donner du courage." Je ne me plains pas. Mais je pense qu’on ne peut compter que sur soi. Ce milieu est un terrain de catch et pour s’en sortir, mieux vaut être taillée pour le combat.
Un jour, on m’a donné ce conseil : dis oui à tout parce qu’on ne te le répètera pas demain…
C’est exactement ça. J’étais en Angleterre pour la sortie d’Appropriate Behaviour. Tout le long, j’ai dormi chez Cecelia, sur son canapé. C’est ma productrice et ma meilleure amie. À cette époque, j’ai fait beaucoup de rencontres, dans le milieu du cinéma. Je me suis aperçue qu’il était beaucoup plus simple et sain de discuter et comprendre les attentes des gens ici, qu’aux États-Unis d’où je viens. J’écrivais beaucoup. Je devais prendre un avion pour repartir à New York et je n’ai jamais passé les portes d’embarquement. Je me suis installée à Londres. Avec mon bagage à main et des idées plein la tête.
Un jour, on m’a donné ce conseil : dis oui à tout parce qu’on ne te le répètera pas demain…
C’est exactement ça. J’étais en Angleterre pour la sortie d’Appropriate Behaviour. Tout le long, j’ai dormi chez Cecelia, sur son canapé. C’est ma productrice et ma meilleure amie. À cette époque, j’ai fait beaucoup de rencontres, dans le milieu du cinéma. Je me suis aperçue qu’il était beaucoup plus simple et sain de discuter et comprendre les attentes des gens ici, qu’aux États-Unis d’où je viens. J’écrivais beaucoup. Je devais prendre un avion pour repartir à New York et je n’ai jamais passé les portes d’embarquement. Je me suis installée à Londres. Avec mon bagage à main et des idées plein la tête.
Comptes-tu rejouer dans tes films ou te concentrer uniquement sur la réalisation maintenant ?
Les deux sont des expériences très différentes et j’aime les mener de front. En ce moment je tourne un film dans lequel je joue mais que je ne réalise pas. C’est très chouette d’être de l’autre côté du plateau pour quelqu’un d’autre. C’est ma manière à moi de m’évader. J’apprends énormément sur un plateau. Lorsqu’on réalise, on doit être attentif à tout et faire attention à chaque détail autour de soi. On n’est jamais complètement en soi lorsqu’on dirige. Je réalise un film dont la sortie est prévue pour 2017 mais je n’ai pas écrit le scénario. J’ai juste été très attirée par l’écriture. Après que mon agent me l’envoie, j’ai passé la nuit à le lire et le relire. Pour la première fois, je me suis dit, « personne au monde ne peut réaliser ce film à part moi. » Ça peut paraître un peu prétentieux mais je n’avais jamais lu un texte aussi proche de ma réalité des choses. Je n’avais jamais rien ressenti de tel.
Que retiens-tu de l’école de cinéma ?
J’aime ce que je fais aujourd’hui. Je ne saurais dire si c’est à l’école que je le dois. J’aimais l’école. Elle m’a offert une structure et m’a enseigné l’organisation. J’aime la vie à plusieurs. Je ne sais pas dans quelle mesure l’école a forgé ou encouragé mon esthétique actuelle mais elle m’a donné l’environnement et la possibilité d’y croire. J’avais besoin qu’on me fasse confiance et qu’on m’épaule.