L’univers foisonnant et multicolore que l’artiste 'Motty' recrée à travers ses œuvres ne laisse personne indifférent. Le terme « ostentatoire » a beau être utilisé à mauvais escient dans notre époque actuelle, Motty met un point d’honneur à l’honorer et lui rendre grâce.
Elle a travaillé pour la publicité, la musique, les magazines et dans le graphisme. Elle accorde beaucoup de crédit et d'importance aux univers visuels des musiciens – qu'elle réalise des stickers pou le groupe de son ami d’enfance ou s'illumine à l'évocation de la couverture de l’album iconique de Björk, Homogenic.
Plus tôt cette année, elle s’est éprise de la couleur rouge, dont elle a parsemé Cloud7, la pochette du premier album de Majiko, talentueuse chanteuse solo. Pour le premier album de KREVA, Use to Bonnou, Motty s’est attelée à refléter la personnalité du groupe et la sienne à travers des collages tout en monochromes – elle estime que le résultat lui ressemble. L’œuvre de Motty fait dialoguer les univers de la mode, de l’art et les interstices qu’il existe entre les deux. Pour les Jeux Olympiques de Sochi en 2014, l’artiste a redesigné la planche de snowboard d’une des participantes d’origine espagnole.
Quand elle ne s’empare pas des objets du quotidien, Motty crée des univers indépendants, conçus ex-nihilo. Lorsqu’elle souhaite représenter l’aura, la profondeur de ses sujets, elle n'hésite pas à s'emparer du médium photographique. Mais quelque soit la technique qu’elle utilise, l’artiste parvient à transmettre une sincérité et une originalité sans cesse renouvelée.
La multitude des couleurs qui s’entrechoquent sous nos yeux demeure plus d’un instant en nous. Le rouge et le bleu qui se répondent et se jouxtent deviennent des images mentales dont il est difficile de se détacher. Cette profusion de couleurs complémentaires, Motty en a fait son obsession et son moteur : « Je suis attirée par les choses qui brillent et scintillent », s’amuse-t-elle à dire.
« Même si je ne dois réaliser qu’un petit flyer, je réfléchis attentivement à l’agencement des couleurs. Je ne choisis pas mes couleurs au hasard, au contraire. Prenons l’exemple du pot de mayonnaise japonais : d’abord, vous voyez le flacon couleur crème, puis le bouchon du flacon, rouge vif. A chaque fois que je m’en empare pour une salade, cet assemblage de couleurs me choque. A travers mes œuvres et la complémentarité des couleurs, je veux provoquer cet effet, séduisant et dérangeant. »
« Je devais être au collège quand on nous a demandé d’utiliser le logiciel Paint sur Windows 98. Je me souviens avoir réalisé quelques dessins après beaucoup d’essais. Je découvrais un nouvel outil sans trop savoir quoi en faire. Mais si me souviens bien, j’ai toujours aimé dessiner et créer, depuis que je suis enfant, » confie-t-elle.
Après ses études à Osaka, Motty s’est installé dans la capitale, à Tokyo. Elle a travaillé en agence avant de se lancer en solo. Ses clients font partie d’univers très différents mais chacune de ses œuvres reste un condensé de l’esthétique personnelle de Motty : « Quand je suis en quête d’inspiration, je ne vais pas la chercher dans les livres et les photos. Je préfère les rues désertes, les grands bâtiments et le calme. Parfois, je m’assois dans la rue à même le sol pour regarder ce qu’il s’y passe. Je ramène avec moi des textures, des couleurs qui me parlent et je tente de les reproduire dans mes œuvres. Parfois, je tire des images de mon sommeil et de mes rêves. »
S’il fallait trouver à Motty des pères spirituels, on se tournerait vers Andy Warhol, Jean Cocteau ou Piet Mondrian. L’artiste emprunte à ses ainés une certaine idée du pictorialisme, un penchant pour le monochrome et une profusion de couleurs frappantes. « J’essaie de faire en sorte que ma propre pate et couleur soit présente dans tout ce que je fais. Si j’en ai la chance, j’aimerais dessiner des monstres et des vêtements avec autant de couleurs que possible », avoue-t-elle. L’avenir nous réservera sans doute quelques surprises.