vendula knopova dessine les robes de mariées de vos pires ennemies

La photographe tchèque auréolée du prix du jury au festival de Hyères l'année dernière présente jusqu'à samedi son nouveau projet à la galerie le Coeur : une fausse agence matrimoniale baptisée ŽIVIJO. Rencontre.

Vendula Knopová est un drôle d’oiseau. Un genre d’ovni artistique qui vous veut du bien. Lorsque la jeune photographe est apparue dans notre champ de vision, c’était à Hyères, en avril dernier, à l’occasion du Festival de la Mode et de la Photographie. Elle recevait des mains de William Klein, photographe émérite et président du jury, le prestigieux prix photo, brouillait les pistes et repoussait les limites de la photographie traditionnelle. Son projet réunissait des fanzines, des boites, des tirages vernaculaires et des cartes postales qui s’entrechoquaient dans l’espace. Mis côte-à-côte, ces drôles de grigris révélaient la démarche sous-jacente de Vendula – cynique, décalée, drôle et anticonformiste. La jeune artiste tchèque se considère d'ailleurs comme une ambassadrice de l’humour et emploie les adjectifs « schizophrène » et « intuitif » pour définir son travail hors de toutes normes. Nous l’avons rencontrée à l’occasion de son exposition à la galerie Le Coeur, ŽIVIJO, une satire virulente et délectable du mariage, de ses codes et ses diktats.

Ton parcours m’intrigue. Est-ce que tu as toujours voulu être artiste ? 

Non.

Comment définirais-tu ton travail ? Est-ce que tu te considères comme une artiste ? Une photographe ?

Ma démarche est schizophrène, intuitive et parfois insensée. Quand quelqu’un me demande ce que je fais dans la vie, je suis souvent incapable de répondre que je suis photographe. Quelqu’un a dit un jour que j’étais une ambassadrice de l’humour et une faiseuse d’images.

L’humour et l’absurdité dialoguent beaucoup dans ton œuvre. Qu’est-ce qui, dans notre société actuelle, te paraît parfaitement absurde ?

La quête effrénée du toujours plus vite. Il faudrait que je sois une pieuvre pour tout gérer en temps et en heure. Du coup, j’aimerais énormément recommander un des livres de Carl Honoré, porte-parole officieux des philosophes et des fervents défenseurs de la lenteur.

Est-ce que ta démarche relève de la revendication ? Floutes-tu volontairement les frontières entre les genres et les pratiques ?

La politique est bien la dernière de mes préoccupations. Je ne m’y intéresse absolument pas. La seule chose qui me frapperait, c’est qu’une girafe soit nommée à la tête d'un gouvernement. En revanche, plutôt que la revendication, la liberté est au cœur de ma pratique artistique.

L’année dernière à la Villa Noailles, ton projet mettait en scène des photos prises par ta mère. Quelle était l’idée derrière cette réappropriation ?  

Ma mère s’appelle Lenka. C’est une maman classique qui aime bien faire des photos au numérique de temps en temps. J’ai fouillé dans son disque dur et récolté quelques images d’animaux de compagnie et des fonds d’écrans de catastrophes naturelles. J’avais envie de les rassembler en les mêlant à d’autres images, plus personnelles.

Est-ce que ta mère est un mentor pour toi ?

Je suis une athée endurcie mais je voue un culte à ma mère comme d’autres à Dieu. Je suis hyper impatiente de découvrir les joies de l’amour maternel. Mais je ne serai pas aussi stricte que ma mère et je laisserai mes enfants porter du rose.

Quel est le plus grand défi que tu as du relever ces derniers jours ?

Mon plus grand défi, c’est moi. Ça peut paraître complètement cliché mais tout ce qui m’importe c’est de parvenir à ne pas répéter les mêmes erreurs. Et à surmonter mes peurs. 

As-tu des obsessions ? Des thèmes de prédilection qui parcourent ton oeuvre ?  

Depuis que je suis enfant, j’ai une peur bleue de la nourriture que j’essaie d’analyser mais que je ne comprends toujours pas. Si ça ne tenait qu’à moi, je passerais ma vie à manger des patates au beurre et des bananes jusqu’à ce que mort s’en suive. Je déteste les conversations qui tournent autour de la nourriture. Elle s’enfonce en moi comme dans une poubelle. À travers mon travail, je tente d’analyser cette obsession.

Tu m’as dit détester les mariages. Mais ton dernier projet à la galerie le Cœur, est une réinterprétation spatiale, scénique et artistique d’une agence matrimoniale. C’est du cynisme ?

Je pense sincèrement qu’on devrait recevoir un prix Nobel à chaque fois qu’on se rend au mariage d’un copain pour lui faire plaisir, alors que c’est clairement nul et interminable. La plupart du temps, on ne fait que s’ennuyer. C’est pourquoi j’ai décidé de créer ma propre agence matrimoniale où tout est à disposition pour faire de ce jour, un rêve inoubliable. Nous offrons nos services dans tous les domaines et nous occupons de tout : du lieu, des petits fours, de l’ambiance, de la déco et du photographe. Nous donnons des conseils mode aux mariées qui le souhaitent, aussi.  

En parlant de conseils mode, tu as créé des robes de mariées pour ton agence matrimoniale. Tu as des dons de styliste, aussi ?

Je suis actuellement en train de peaufiner ma collection printemps/été 2042 intitulée Wedding Dress For My Enemies (Robes de mariées pour mes ennemies). Pour 2073, je prévois de réaliser une collection exclusivement faite de mouchoirs de poche.

Qu’est-ce que tu conseillerais, aux filles qui veulent se marier aujourd’hui ?

Raye tous les noms des oncles pervers de ta liste d’invités.

Tu ne crois plus à l’amour ?

L’amour, c’est la liberté et celui qui n’y croit plus peut tout aussi bien se jeter par la fenêtre.

Être une femme artiste en 2016, à quoi ça ressemble ?

Je considère les hommes et les femmes égaux en droits et en devoirs. Sauf quand j’ai besoin qu’on m’ouvre un pot de confiture. 

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